Education. S’adapter à l’âge de l’enfant

Education à la bonne heure [bonheur]!

par R’ Eliyahou Bakish

 

Entre la crainte d’une éducation trop stricte et celle menant à l’assimilation, les parents s’interrogent sur la ligne éducative à suivre. Le folklore juif détaché de toute connotation religieuse n’éduque pas au respect des mitsvot. Même le retour au pays ne suffit pas à assurer la transmission d’un judaïsme associant fidélité aux préceptes de la Torah et épanouissement personnel. Comment relever le défi de l’éducation dont dépend la pérennité du peuple juif? Evidemment, le choix d’un établissement scolaire religieux est un facteur déterminant mais le rôle des parents reste essentiel.

 

Eduquer en fonction des capacités de l’enfant

L’éducateur devra veiller à s’adapter à l’âge de l’enfant. Détaillons : parfois la synagogue est belle, les fidèles amicaux, la prière mélodieuse, la lecture de la Torah parfaite, l’apéro copieux… et pourtant! Les jeunes sont rares. Pourquoi ce manque de motivation? Certains diront qu’à notre époque, ils préfèrent le virtuel au réel. Peut-être! Pour ma part je chercherais la cause de ce fléau dans la petite enfance…

Un cas: un père amène son fils de quatre ans à l’office du chabat. Après quelques minutes, l’enfant ne tient plus en place. Le père menace de sévir… promet une récompense… rien n’y fait. Le père fâché fini par ramener l’enfant à la maison. Lorsque la demande est inadaptée, la réaction le sera tout autant! Emmener un enfant trop jeune à la synagogue est une erreur gravissime. Il conservera le souvenir d’un lieu ennuyeux où son père se met en colère. Je me souviens d’un rabbin qui n’emmena son fils à la synagogue qu’à partir de huit ans. Aujourd’hui ce fils est lui-même rabbin!   

Le roi Salomon enseigne : «Éduque le jeune selon sa route. Même lorsqu’il vieillira, il ne s’écartera pas [de la bonne éducation]»[1].  La Michna[2], le Talmud[3] et les maîtres tossaphistes[4] vont tous dans le même sens: on éduque chaque enfant à la pratique des mitsvot, selon ses capacités. Ce conseil éducatif est également un impératif halakhique : si d’après la Torah, ce n’est qu’à partir de la majorité religieuse (12 ans pour une fille, 13 ans pour un garçon) qu’il est obligatoire de se conformer à la loi juive, les Sages ont imposé le respect des mitsvot dès que l’enfant y est apte. À titre indicatif, voici une liste indiquant l’âge moyen adapté pour quelques mitsvot[5].

 

Dès qu’il sait parler : on lui enseigne les versets Torah tsiva lanou Moché, moracha, kéhilat Ya’akov[6] et Chéma Israel Hachem Elokeinou Hachem é’had[7].

 

3 ans : 1. L’enfant comprend les notions de permis et d’interdit. Il faudra l’éduquer à ne pas transgresser les lois. 2. L’enfant est apte à procéder aux ablutions (nétilat yadayim). 3. Les garçons propres peuvent porter un talit katan. 4. L’enfant sait donner ; on lui fournira de quoi offrir un michloa’h manot à pourim.

 

4 ans : On habituera son garçon au port de la kipa.

 

5 ans : 1. Lecture ou répétition du chéma’ matin et soir. 2. Lecture de certains passages de la prière. 3. On éduque au respect des lois liées à la consommation : quelques bénédictions, abrégé du birkat hamazone, repas chabatique, festin de pourim, quatre verres de jus de raisin à pessa’h. 4. A soukot, demeurer et dormir dans la souka. 5. Compte du ‘omer tous les soirs.

 

6 ans : 1. L’enfant intègre la notion de reconnaissance. Pour qu’il remercie Hachem, on lui fait prononcer des bénédictions avant et après la consommation d’un met ; lire le Hallel. 2. A pessah on éduque l’enfant à manger un kazayit de matsa en un temps inférieur à sept minutes.

 

7 ans : 1. L’enfant est apte à prier la ‘amida. 2. A Roch hachana on l’éduque à écouter les sonneries du chofar.

 

8 ans : Il est bon d’enseigner à l’enfant toute la paracha hebdomadaire.

 

9 ans : 1. A kipour, un enfant en parfaite santé pourra jeûner quelques heures. Avant cet âge, même un enfant en parfaite santé ne doit pas jeûner. 2. Le 9 av : on explique qu’en ce jour les deux temples de Jérusalem ont été détruits. Pour ‘marquer le coup’ on éduque à ne pas se laver, à ne pas porter de chaussures en cuir et à s’abstenir de sucreries.

 

11 ans : A kipour un enfant en parfaite santé pourra jeûner intégralement.

 

12 ans : Apres la consommation de viande on éduque l’enfant à attendre avant de prendre des laitages (6 ou 3 heures, selon la coutume). Avant cet âge, une heure d’attente suffit. Certains préconisent une heure d’attente entre 3 et 5 ans, 3 heures entre 5 et 10 ans et 6 heures au-delà.

 

La Bat ou Bar mitsva : fin de l’éducation parentale?

L’importance de l’éducation au cours des premières années de la vie est soulignée par nos Sages[8]. Ils enseignent qu’à partir de la majorité religieuse le principal de l’éducation est acquis. Il n’y a plus de réelle obligation halakhique d’éducation[9]. Les parents continueront à conseiller, orienter et parfois même à réprimander leur enfant si besoin est[10]. Il incombe tout particulièrement aux parents d’orienter leur enfant entre seize et vingt-quatre ans, au-delà, le jeune adulte totalement indépendant risquerait de se rebeller contre son éducateur[11].

 

N’oublions pas qu’amour, patience et exemple parental contribuent à la réussite de l’éducation aux mitsvot et au bonheur familial. Evidemment, la méthode «fait ce que je dis, pas ce que je fais!» est à bannir.

 

© R’ Eliyahou Bakish, août 2022 [12]

 

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NOTES

[1] Michlé 22,6. חֲנֹ֣ךְ לַ֭נַּעַר עַל־פִּ֣י דַרְכּ֑וֹ גַּ֥ם כִּֽי־יַ֝זְקִ֗ין לֹֽא־יָס֥וּר מִמֶּֽנָּה

[2] Avot 5, 22.

[3] Souka 42a.

[4] Souka 28b, ‘Arakhine 2b.

[5] Yaroun Véssamea’h, Yalkout Yossef sur l’éducation, Sefer Hakacheroute.

[6] Dévarim 33,4.

[7] Dévarim 6,4.

[8] Voir aussi Avot 4, 25.

[9] Talmud Nazir 29b. Magen avraham sur Choul’hane ‘aroukh 225, 2 (5).

[10] Michna beroura 225, 2 (7).

[11] Choul’hane ‘aroukh Harav, lois sur l’étude de la Torah 1, 6.

[12] L’auteur célèbre les mariages, est mohel et éditeur (collection halakhique Dérekh mitsvotékha ; site web brit-milah.com). Contact: voir la page accueil de ce site.